Ça fait quelques années que j’ai quitté un emploi de bureau pour voyager et vivre une vie différente, et si j’ai rencontré pas mal de succès dans mes projets ça faisait pas mal de temps que je songeais à donner plus de mon temps pour aider les autres. J’en ai profité pour le faire lors de mon séjour en Colombie.
A mon arrivée à Bogota en novembre dernier j’ai découvert le projet humanitaire « Un techo para mi païs » (« un toit pour mon pays »), il s’agit de construire des maisons pour des familles pauvres.
J’avais trouvé le concept génial et je m’étais dit que je participerai un jour.
A mon retour du Brésil j’ai appris qu’une amie de ma copine participait à ce projet et je me suis dit que c’était le moment ou jamais de participer à ce projet.
J’ai donc réglé le montant de mon inscription (35 000 pesos colombiens soit environ 15 euros pour couvrir les frais de transport et la nourriture – hey ouais on paye pour travailler !), j’ai acheté le matériel nécessaire (bottes, gants de construction) et je me suis rendu au rendez-vous le vendredi 12 août 2011.
Voici le récit de ces 3 jours intenses.
Rendez-vous à l’université de la Javeriana (une université privée de Bogota). Énormément de monde présent, peut-être 200 personnes, des jeunes étudiants pour la plupart.
Les chefs de groupe prononcent un discours contre la pauvreté en Amérique latine, on regarde un court film sur la fondation et ensuite on rejoint notre groupe, au total ce sont une petite dizaine de barrios (quartiers) où les volontaires vont se diriger, et rien que pour notre quartier nous sommes deux cars (une soixantaine de volontaires).
A cause de la forte affluence ce jour-là on arrive très tard sur les lieux (vers minuit), il faut encore décharger tous le matériel et s’installer dans l’école qui nous a été prêtée pour l’occasion.
Nous voila donc une soixantaine à camper dans la salle principale.
Guaval est une commune rurale perchée à 3 000 mètres d’altitude dans les collines au sud-ouest de Bogota.
Je me couche rapidement pour me reposer en vue du lendemain, un des chefs vient me réveiller et m’informe qu’il faut sortir pour faire une activité, je lui réponds « t’es pas sérieux ? » et ils nous font sortir pour faire un jeu consistant à constituer des groupes de 5 ou 6 et se présenter avant de changer de groupe rapidement.
A 2 heures du matin et dans un froid glacial j’avoue que je trouve l’idée un brin farfelue mais l’ambiance est bonne et tout le monde est vraiment adorable.
Extinction des feux et dodo sur les coups de 3 heures du matin.
Le lendemain vers 6 heures le réveil (en musique) est plutôt difficile, on prend notre petit déjeuner et ensuite les chefs d’équipe nous font faire quelques activités.
On charge ensuite les outils et on se dirige vers nos chantiers respectifs.
Je suis avec deux garçons et trois filles, tous colombiens, et nous grimpons une forte côte pour construire la maison de Rosa, une femme qui élève seule sa fille de douze ans.
Elles habitent dans une maison minuscule constituée de 4 planches et elle a payé une somme symbolique pour que la fondation lui construise une maison décente.
Sa famille lui laisse un bout de terrain en contrebas sur lequel on commence à creuser des trous pour accueillir les 15 pilotis en bois qui serviront de fondation à sa maison.
Manque de chance on trouve des grosses pierres dans le sol qu’il faut briser et le travail commence à devenir beaucoup plus difficile, qu’à cela ne tienne nous sommes motivés et on continue coûte que coûte.
Nous terminons cette première journée de travail vers 18 heures, en rentrant notre chef de groupe (« pelos » soit « cheveux » en espagnol) nous explique qu’il faut faire un sketch devant tout le monde le soir même sur le thème de l’extrême pauvreté.
Je me dis qu’ils sont gonflés de nous demander ça après un travail aussi difficile mais après un petit brainstorming nous trouvons une idée sympa et on se remet en route vers l’école.
Après la séance des sketchs (très sympas, beaucoup de bonnes idées et d’humour) on regarde le match de foot (la Colombie joue contre le Mexique en quart de finale de la coupe du monde des moins de 20 ans qui a lieu ici en Colombie) et tout le monde s’endort sur les coups de 22h ce qui nous permet de récupérer de la nuit précédente.
Le lendemain – 6h pour changer – réveil en musique à nouveaux, quelques activités et en route pour le chantier, nous avons un peu de retard à cause des pierres et nous sommes bien motivés pour terminer tous les pilotis.
En plus que les trous soient beaucoup plus difficiles à creuser il faut couper les pilotis (car impossible de creuser très profond), ce qui demande à chaque fois une demi-heure pénible de travail pour les 3 hommes de l’équipe.
Je ne compte plus les ampoules sur mes doigts, et je commence à avoir de grosses crampes au poignet à force de creuser.
Heureusement en fin de journée deux frères de Rosa pointent leur nez, ils travaillent dans les champs et sont rôdés aux travaux physiques.
On termine la journée en pleine nuit noire (vers 19 heures), tous les trous sont creusés, il nous reste plus qu’un pilotis à installer.
Rosa et sa fille rentrent avec nous car ce soir-là est spécial, les familles sont invitées à l’école pour partager avec les volontaires.
Il faut savoir que l’échange avec les volontaires est très important, ça permet d’établir des liens dans une société colombienne entâchée de fortes inégalités.
Chaque famille accompagnée de son équipe prononce un discours de remerciement devant tout le monde, et on en profite pour faire connaissance avec les familles des autres équipes. Beaucoup d’émotion.
6h – musique – vous connaissez le refrain (nous aussi d’ailleurs on commence à le connaitre..)
Après une activité de groupe (un jeu hyper sympa) on retourne sur le chantier, c’est le dernier jour de ce week-end prolongé et il faut finir la maison coûte que coûte.
Des voisins et des membres de la famille se joignent à nous pour terminer les travaux et on se retrouve une bonne douzaine à s’affairer, avec en prime les enfants qui tournent autour (et qui participent même pour certains).
Vers 17 heures on pose le dernier clou et on improvise une petite cérémonie au cours de laquelle on remet officiellement la maison à la famille.
A notre retour à l’école nous réalisons avec surprise que nous sommes les premiers, les autres équipes ont rencontré beaucoup de difficultés et ce n’est qu’à 21h que les bus décolleront pour un retour dans le centre de Bogota vers 22 heures.
Physiquement ce fût très dur: le manque de sommeil, les travaux pénibles, le soleil, la pluie, la faim et la soif (les rations étaient très limitées), c’est pas surprenant que pour participer il faille avoir entre 18 et 30 ans (ils ont fait une exception pour moi).
Bravo à toute mon équipe: Pelos (Juan), Victor, Carolina, Monica et Sylvana qui se sont donnés à fond pendant ces trois jours.
J’ai été vraiment impressionné par la qualité de l’organisation, il faut savoir que la fondation « Un techo para mi païs » intervient dans une vingtaine de pays d’Amérique latine.
Au-delà de construire des maisons l’action de la fondation va beaucoup plus loin: des équipes se montent pour accompagner les quartiers dans la durée, avec des actions dans les domaines de la santé et du microcrédit notamment.
En participant à ce projet j’étais un peu sceptique, je me disais qu’il s’agissait de fils à papas voulant s’offrir un peu d’aventure (la plupart des volontaires sont étudiants dans les universités les plus chères de Bogota), mais au final j’ai réalisé quelque chose de très important: c’est que si ils ne le font pas, personne ne le fera à leur place.
Ils auraient pu passer le week-end à faire la fête mais non, ils ont décidé de sacrifier leur temps de repos pour aider des familles démunies à vivre dans des conditions plus décentes.
J’ai été vraiment impressionné par l’enthousiasme de ces jeunes et par l’esprit de générosité qui a régné tout au long du week-end.
De plus, comme le disait un des volontaires, ces jeunes seront les décideurs de demain, et leur participation à ces actions humanitaires va les sensibiliser durablement à la problématique de la pauvreté dans leur propre pays.
Ces actions permettent également de leur faire prendre conscience qu’ils sont acteurs du monde dans lequel ils vivent, et que les choix qu’ils font, les actions qu’ils entreprennent, on des conséquences sur le futur.
Si vous voulez participer vous aussi au changement faites un don à la fondation
Qu’est-ce que vous pensez de cette expérience ? Est-ce que vous avez déjà pensé participer à un projet humanitaire pour donner un peu de votre temps ou de votre argent ?
Je suis curieux de savoir combien d’entre vous partagent cette préoccupation d’aider, même à petite échelle.
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